À Panamasso, localité située à une vingtaine de kilomètres au nord de Bobo-Dioulasso, David Sanou et Alexis Soungalo Sanou incarnent la résilience paysanne. Ces deux agriculteurs, confrontés à la dégradation accélérée de leurs terres, ont choisi de miser sur l’agroécologie pour maintenir leurs activités agricoles. Rotation des cultures, cordons pierreux et bandes enherbées sont devenus leurs meilleures armes pour redonner vie à leurs champs et espérer un avenir durable.
Le Burkina Faso, pays sahélien, est durement frappé par le changement climatique. La variabilité des pluies, les sécheresses prolongées et les inondations répétées détruisent chaque année des milliers d’hectares de terres arables. Entre 2002 et 2013, le pays a perdu en moyenne 460 950 hectares de terres par an. De 1992 à 2014, près de la moitié du domaine forestier a disparu. Ces chiffres alarmants, issus du rapport national sur la neutralité en matière de dégradation des terres, témoignent de la gravité de la situation.
À cela s’ajoute l’insécurité grandissante, qui pousse de nombreux producteurs à abandonner leurs champs pour se réfugier dans des zones plus sûres, souvent moins fertiles. Le cumul de ces facteurs fragilise une agriculture dont dépend près de 80 % de la population, et accentue les risques d’insécurité alimentaire.

Le cordon pierreux pour ralentir l’eau et sauver la terre
Pour contrer cette spirale, les paysans et chercheurs burkinabè développent des pratiques agroécologiques adaptées. Le cordon pierreux est l’une des plus répandues. Il consiste à disposer des pierres en travers des pentes et des zones de ruissellement afin de ralentir l’eau de pluie. En réduisant sa vitesse, l’eau a le temps de s’infiltrer dans le sol plutôt que de l’emporter. Cette technique permet non seulement de lutter contre l’érosion, mais aussi d’améliorer la fertilité des sols et de favoriser la régénération naturelle de la végétation.
David Sanou et Alexis Soungalo en témoignent. « Quand la pluie tombe, l’eau s’arrête derrière les pierres, le sol retient l’humidité, et nos cultures en profitent », expliquent-ils, satisfaits de voir leurs terres autrefois stériles redevenir productives.

Des herbes qui protègent et nourrissent
En complément, les producteurs de Panamasso utilisent la bande enherbée. Elle consiste à planter des herbacés sur des courbes de niveau perpendiculaires à la pente, formant une barrière naturelle contre le ruissellement. Ces herbes – notamment l’Andropogon gayanus et le Vetiveria nigritana – sont réputées pour leur puissant système racinaire. Elles fixent le sol, ralentissent l’érosion et facilitent l’infiltration de l’eau.
Selon Baba Ouattara, chercheur à l’INERA/Farakoba, « ces herbacés retiennent l’eau et réduisent la force érosive du ruissellement ». Leur intérêt ne s’arrête pas là : en plus de protéger les champs, ces plantes servent de fourrage pour les animaux, et trouvent des usages dans l’artisanat ou même dans l’amélioration de la qualité de l’eau de boisson.

Une agriculture durable malgré l’adversité
Grâce à ces pratiques, David et Alexis ont pu restaurer des parcelles dégradées. Dans leurs champs, ils pratiquent également la rotation des cultures : manioc, sésame, puis maïs, une alternance qui enrichit les sols tout en diversifiant les sources de revenus.
Ces choix agroécologiques témoignent d’une volonté de produire durablement, malgré un contexte marqué par l’érosion, la pression démographique et l’insécurité. Pour de nombreux spécialistes, le cordon pierreux et la bande enherbée ne sont pas de simples techniques, mais de véritables solutions d’adaptation, capables de renforcer la résilience des communautés rurales face aux crises climatiques et sécuritaires.
En adoptant ces pratiques, les producteurs burkinabè prouvent qu’il est possible de transformer la contrainte en opportunité, et de bâtir une agriculture plus respectueuse de l’environnement et mieux préparée aux défis de demain.
Espoir info